Cet éclairage a été publié pour la première fois par Gladys KONATE, en juin 2019, dans La Revue n°5.
L’application de la loi pénale dans le temps répond à la question suivante : pour un cas donné, quand une nouvelle loi entre en vigueur, faut-il appliquer l’ancienne ou la nouvelle loi ? Pour répondre à cette question de manière synthétique, il faut distinguer le cas des lois de fond et des lois de forme. Les conflits de loi ont des implications très concrètes. Par exemple, avant 1981, des personnes étaient condamnées à mort mais lorsque la loi sur l'abolition de la peine de mort est entrée en vigueur, elles ont pu en bénéficier. Il s'agit là d'un cas de rétroactivité "in mitius" dont nous parlerons un peu plus bas, parmi bien d'autres cas.
Les lois de fond - Deux grandes règles concernent les lois de fond d’après l’article 112-1 du code pénal[1]. D’abord, le principe : la non-rétroactivité de la loi pénale. Cela signifie qu’en principe, lorsqu’une loi nouvelle entre en vigueur, c’est la loi ancienne qui s’applique aux situations en cours. Cela concerne les lois pénales plus sévères : par exemple, une incrimination rendue plus large, une circonstance aggravante créée… Cela parait logique : il serait injuste de poursuivre une personne alors que celle-ci ne pouvait pas savoir qu’elle commettait une infraction. Ensuite, l’exception : la rétroactivité « in mitius », c’est-à-dire, l’application immédiate de la loi nouvelle plus douce. Cela signifie une disposition favorable à l’intéressé s’appliquera immédiatement au détriment de l’ancienne loi plus sévère. Ce principe repose sur l’article 8 de la déclaration des droits de l’homme et du citoyen selon lequel la loi ne doit établir que des peines strictement et évidemment nécessaires : ce principe est à valeur constitutionnelle. En effet, si une disposition plus douce entre en vigueur, la disposition antérieure n’est alors plus nécessaire.
Les dispositions plus douces sont par exemple celles qui suppriment l’incrimination, transforment le crime en délit, rajoutent des conditions étroites à l’incrimination, suppriment la peine, ajoutent une peine alternative à l’emprisonnement…
Lorsque la loi est à la fois douce et sévère et qu’elle est divisible, il faut procéder à une dissociation. Si elle est indivisible, il faut regarder l’orientation de l’ensemble ou de la disposition principale et appliquer le principe qui y correspond.
Les lois de forme - Les lois de forme sont celles qui, d’après l’article 112-2 du code pénal, concernent : l’organisation judiciaire, la compétence des juridiction -sauf s’il y a eu jugement au fond[2]- , les modalités des poursuites et les formes de la procédure -par exemple : les délais- , la prescription et enfin le régime d’exécution et d’application des peines -par exemple : l’institution d’une peine-.
Les lois de forme sont d’application immédiate : elles s’appliquent donc aux infractions commises avant leur entrée en vigueur.
Gladys KONATÉ
[1] Article 112-1 du Code pénal : « Sont seuls punissables les faits constitutifs d'une infraction à la date à laquelle ils ont été commis. Peuvent seules être prononcées les peines légalement applicables à la même date. Toutefois, les dispositions nouvelles s'appliquent aux infractions commises avant leur entrée en vigueur et n'ayant pas donné lieu à une condamnation passée en force de chose jugée lorsqu'elles sont moins sévères que les dispositions anciennes. »
[2] Acquittement ou condamnation
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